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date dernière modification : 22/07/02

Chronique du 06 Janvier 1998

Léon Zyguel : « Papon, a toujours été du côté des oppresseurs »

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06 janvier 1998

Léon Zyguel : « Papon, a toujours été du côté des oppresseurs »

Photo Betty Weider

L’audience a été marquée par la déposition du premier témoin revenant, selon ses propres termes, des camps de la mort. Léon Zyguel a été déporté à l’âge de 15 ans, arrêté à Mont de Marsan avec ses deux frères et sa soeur le 29 juillet 1942 par la Feld gendarmerie. Il est pris en charge alors par l’administration française, interné à Mérignac, d’où son frère Marcel s’évade. Transféré le 26 août à Drancy, il y retrouve son père, interné depuis août 1941. Puis c’est Pithiviers et fin septembre, le convoi 35 pour Auschwitz, 1028 déportés et seulement 23 rescapés, dont son frère Maurice et lui. Et là pendant trois ans, il vivra l’enfer quotidien, la mort présente chaque jour, à chaque heure, à chaque seconde. En conclusion, il dira " Je suis resté toujours fidèle à mon serment de la cour d’appel. (du camp de Buchenwald) J’ai toujours continué le combat au côté des opprimés. Papon, lui a toujours été du côté des oppresseurs. "

Léon Zyguel, à l'âge de sa déportation, 15 ans...

Léon Zyguel, 70 ans, Montreuil : " Tout d’abord, je veux citer, ici ma famille. Mon père est arrivé en 1920 en France, c’était après la guerre 14-18 et la France avait besoin de main d’oeuvre. Il s’est installé près de Nancy, ma mère est arrivée un an après et ils se sont mariés en 1921. De ce mariage sont nés six enfants, deux à Nancy et quatre à Paris. Notre père était métallurgiste, mais malgré nos faibles moyens, nous étions une famille heureuse, unie ; il régnait la joie de vivre, la bonne humeur, on entendait souvent des rires. Nous étions une famille heureuse. Avec la guerre, la défaite et l’arrivée des lois antijuives, sont arrivées les nombreuses restrictions, les nombreuses privations : pas de cinéma, pas de sorties, les horaires contraignants, il était devenu très difficile de vivre. A Paris, en 1941, c’est la première rafle du 20 août, nous vivions dans le 11° arrondissement, le quartier rouge de Paris. Il y avait beaucoup d’actes de résistance contre l’occupant : affiches sur les murs, panneaux de la circulation inversés pour faire perdre l’occupant, dégradation des bâtiments publics, résistance passive, etc.. Mon père a été arrêté à ce moment. Et une année après, c’est la grande rafle du 16 juillet 1942 pendant laquelle on a interné plus de 16 000 Juifs étrangers. Devant cela, ma mère décide de passer en zone libre, mais elle décide de le faire en deux fois : une partie des enfants d’un côté, Hélène, Maurice, Marcel et moi-même, et après, elle et mes autres frères et soeurs. Nous sommes donc partis le 25, 26 juillet 1942 de Paris vers le sud. Arrivés à Mont de Marsan, nous sommes arrêtés le 29 par la Feld gendarmerie. Nous n’avions pas de papiers d’identité, que des actes de naissance. Nous sommes interrogés et finalement nous avons avoué que nous étions juifs, après avoir subi les coups et le sempiternel " baisse ta culotte " on a fini par avouer. Nous sommes partis à la prison d’Orthez, puis de là, conduits à Mérignac par des gendarmes français.

Dès notre arrivée au camp, nous nous sommes dit : " il faut absolument s’évader, si nous restons ce sera la déportation et au bout, la mort ". Mes deux frères aînés, Marcel et Maurice, devaient s’évader seuls parce que ma soeur et moi avions moins de 16 ans et nous étions français, ils pensaient que nous ne craignions rien. Le 6 août, pendant une alerte aérienne, la base aérienne était près du camp de Beaudésert, les lumières étaient éteintes et mes deux frères se sont enfuis et ont atteint le chemin de ronde. Marcel saute et tombe sur les fils de fer barbelés. Le bruit alerte un garde qui trouve Maurice sur le chemin de ronde. Il appelle un autre garde, qui surveille Maurice, pendant que lui va chercher Marcel dehors. Marcel se cachait dans les herbes autour du camp. Voyant cela, Maurice se met à courir sur le chemin de ronde, pour faire partir les gardes et aider Marcel. On lui tire dessus, heureusement, mal et il n’est pas atteint. Il a été repris et conduit à la baraque aux otages. Le lendemain, on m’interroge, on voulait savoir quels pouvaient être les différents points de chute de Marcel, notre adresse à Paris, etc.. Je dis n’importe quoi, et je me souviens leur avoir dit, de toute façon je suis français, j’ai moins de 16 ans, je vais être libéré, les gardes rigolaient. Le lendemain, on m’interroge à nouveau, parce que Maurice n’avait pas dit les mêmes choses que moi, mais j’ai maintenu ma déposition et surtout j’ai redit : " je suis français, j’ai moins de 16 ans, on va me libérer. ", cela faisait rire les gardes et le directeur du camp de Mérignac. Dans le camp, les gardes étaient brutaux, ils étaient habillés de noir, notre lot quotidien c’étaient de nombreuses tâches, des corvées, on avait peu de nourriture. Il y avait beaucoup de gens de la région qui recevaient des colis de nourriture, il y avait une grande solidarité et on partageait la nourriture. Un avis a été diffusé contre mon frère au niveau national et envoyé aux nazis, il disait : " Marcel Zyguel, le Juif recherché ". Il est retourné à Paris prévenir ma mère, il pensait qu’elle était en danger et il lui a dit : " il faut partir ". Je me suis retrouvé seul, mon frère était dans la baraque aux otages et ma soeur Hélène dans une autre baraque. J’étais dans la baraque numéro 5, on se voyait de loin avec mon frère et ma soeur, on se faisait des signes. Souvent une délégation venait visiter le camp de Mérignac. C’était des civils qui semblaient être les supérieurs du directeur du camp. J’ai été les voir pour leur dire : " je suis français, j’ai moins de 16 ans, je dois être libéré, je ne suis pas déportable, " et là, ils m’ont ri au nez, et la dernière fois qu’ils sont venus, ils m’ont dit : " de toute façon, tous les Juifs seront déportés ". Le 26 août, j’ai vu Maurice les menottes aux poignées, j’ai dit : " je veux rester avec toi ". Le garde a dit alors : " ah bon, si tu veux rester avec lui, très bien ", et ils m’ont amené avec lui. Nous avons été conduits à la gare Saint Jean, je ne sais plus si c’est en bus ou en camion. Arrivés à la gare Saint Jean, je me souviens que, bizarrement, nous sommes restés seuls, mon frère et moi, isolés, au bout d’un quai. Nous ne savions pas quoi faire ni pourquoi on était là. Puis, nous sommes embarqués dans des wagons de voyageurs, nous étions cinq par compartiment, avec un garde, et il y avait un inspecteur de police dans chaque wagon. Nous avions des menottes, l’inspecteur de police est venu nous voir et nous a dit : " là où vous allez vous n’avez pas besoin de cartes d’alimentation, donnez-me-les ", et il nous les a prises. Arrivés à Drancy, on nous a retiré nos menottes, nous attendions sur la cour d’appel sans bouger. Les gendarmes sont partis signer des papiers et nous en avons profité pour rejoindre les autres. Nous avons de suite demandé si notre père était là, on peut imaginer la détresse d’un père, enfermé à Drancy depuis 1 an, qui voit arriver ses deux fils et sa fille. Nous sommes restés trois ou quatre jours, puis sommes partis à Pithiviers. Les conditions de vie à Drancy étaient horribles : saleté, c’était une vraie fourmilière, immense et complètement inorganisée, on dormait sur la paille, il y avait des excréments partout. A Pithiviers, nous sommes arrivés dans une baraque, on dormait sur la paille, il y avait beaucoup de puces, pas de nourriture. Fin septembre, nous sommes partis par le convoi 35, 1028 déportés et seulement 23 rescapés. A partir de ce moment, quand je parlerai, je ne pourrai que parler de la mort, elle est toujours présente.

C’est le train de la mort, les camps de la mort et la marche de la mort, trois ans d’enfer.

Photo Betty Weider

Nous partons en wagons plombés, nous étions cent à cent vingt par wagon, serrés les uns contre les autres, sans nourriture. On faisait nos besoins comme on pouvait, il y avait un seau et quand on le vidait par la seule fenêtre, il en tombait autant dedans que dehors. Le voyage a duré trois jours et trois nuits. Quand le train s’arrêtait, ils autorisaient quelques hommes à aller chercher de l’eau, mais nous n’avions pas de récipient. Nous avions été complètement dépouillés à Pithiviers, nos bagages avaient été vidés de tout ce qu’ils contenaient : boîtes de conserve que les familles envoyaient, vêtements, etc.. Nous avons voyagé pendant plusieurs jours. Le train s’est arrêté et on est descendus, avec mon père et mon frère Maurice. Nous sommes partis avec les hommes valides au travail et ma soeur Hélène est partie de son côté, nous ne l’avons jamais revue. Nous n’avons jamais eu de nouvelles d’elle. En Haute Silésie, il régnait un climat continental, il faisait très froid l’hiver et très chaud l’été. Les conditions étaient épouvantables, très dures à supporter. Nous étions dans un camp qui dépendait d’Auschwitz Birkenau, les camps autour étaient des camps d’extermination par le travail. Ils prévoyaient le travail en fonction de conditions très dures. En général, ils avaient prévu six mois de programme de travail par homme valide.

photo FNDIRP

A notre arrivée, la moitié est partie travailler et la moitié est allée se faire désinfecter et raser. J’avais 15 ans, et contrairement à aujourd'hui, j’avais beaucoup de cheveux. Quand ils m’ont rasé, je me souviens très bien de la tondeuse électrique sur le crâne, mes cheveux sont tombés dans mes mains et je me suis senti humilié, c’était insupportable. J’étais atteint dans ma dignité. Le travail était très difficile : on faisait du terrassement, on déchargeait les wagons ou les camions. Nous n’avions jamais de repos, toujours au pas de course, toujours des coups et des sévices, une violence permanente. Un écrivain a écrit dans un livre que nous étions des survivants, des rescapés, mais je crois qu’on devrait nous appeler les revenants, c’est le terme le plus approprié, le plus justifié, à cause de cette mort permanente. La durée de vie, dans ces camps, était très courte : de six mois. On mangeait, chaque jour, une ration de pain de deux cent grammes, c’était plutôt du son ; une assiette de soupe, c’était plutôt de l’eau avec quelques légumes et le matin une tasse de café. On vivait tous les jours avec la mort. Le légume qu’on nous donnait était du rutabaga coupé en fines lamelles, je me souviens quand on déchargeait les wagons ou les camions de nourriture, il y avait des sacs de papier, avec dessus, cette inscription en allemand, je vais la traduire, vous la comprendrez mieux. Il y avait écrit : " nourriture pour les cochons, les prisonniers russes et les Juifs. ". Rapidement, nos camarades perdaient la vie. On travaillait sur une autoroute qui traversait une forêt, quand un camarade tombait de froid, on essayait de le ranimer, on lui passait de la neige sur le torse pour le ranimer ; mais, le soir ou dans la nuit, il mourrait. Le S.S. qui commandait le camp, comme il n’y avait pas de crématoire, avait décidé d’enterrer les morts. Malheureusement, mon frère et moi avons été dans ce commando, qui enterrait les morts après la journée de travail. Dans tous les camps, la situation était identique, il y avait le même type de travail : terrassement, déchargement des wagons ou des camions, même le dimanche, quand un train arrivait, il fallait le décharger.

Photo Betty Weider

C’était des sacs de ciment de cinquante kilos ou des rails de chemin de fer qui pesait cent kilos au mètre, et toujours, cela se passait sous les coups. J’ai connu comme cela plusieurs camps. En 1943, les S.S. sont venus chercher un certain nombre de déportés. Mon père était malade, il avait un ulcère à l’estomac. Ils ont dit qu’ils le conduisaient vers un camp sanitaire, mais on savait très bien où il allait. Au bout d’un an, une espèce de dureté était apparue, nous avions une grande pudeur, on s’est dit au revoir avec mon père, comme si on allait se revoir bientôt. Il ne fallait pas montrer qu’on pleurait. Le deuxième coup porté à ma dignité, c’étaient les poux : on passait les longues soirées à des séances d'épouillage. Un jour, les S.S. décident que tous les jeunes recevront dix coups de nerfs de boeuf, c’était terrible comme punition à cause du froid. Chaque jeune sortait des rangs et recevait ses dix coups de nerfs de boeuf, puis il allait faire de l’exercice pour que le sang revienne et circule à nouveau. Quand notre tour est arrivé, les camarades étaient obligés de tenir mon père car il était fou de rage. On a reçu, mon frère et moi, nos dix coups, sans rien dire, sans pleurer. Il fallait qu’on ne montre pas aux Allemands qu’on craquait. Dans les camps, il y avait beaucoup de suicides. On retrouvait les déportés pendus dans les toilettes le matin, ou encore ils se jetaient sur les fils de fer barbelés électrifiés. Les gardes les laissaient faire, cela les faisait beaucoup rire.

Photo Betty Weider

D’habitude, on ne pouvait pas s’approcher à moins de dix mètres des fils de fer barbelés, mais là ils nous laissait faire exprès. Souvent les sévices poussaient les déportés au suicide, les gardes frappaient les déportés la journée et leur disait : " toi, je ne veux pas te revoir demain ". Le matin, sur la cour d’appel, nous étions en plein vent, il faisait très froid. On restait une heure, deux heures et dans certains camps, il fallait amener les morts et les mourants avec nous pour l’appel. Les mourants nous regardaient, on ne pouvait rien faire pour eux. Ils s’accrochaient à nos pantalons. On ne pouvait pas les regarder, la place d’appel était terrible. Après, nous sommes partis à Auschwitz 3. Il fallait faire plusieurs kilomètres à pied pour aller travailler, nous devions traverser un village, les gens nous insultaient, les enfants nous jetaient des pierres.

Photo Betty Weider

Dans ce camp, on partait avec un Kapo en commando, on faisait de l’huile synthétique. Longtemps, j’ai travaillé à faire l’isolation des tuyaux, ils étaient très chauds, brûlants et on devait les isoler avec de la laine de verre. Les fibres de la laine de verre me rentraient partout dans le corps, les mains, le visage, et le soir on ne pouvait pas se laver. Dans ce camp, il y avait des pendaisons pour des broutilles, des vols d’un morceau de pain, d’un bout de ferraille. Un soir, tout le monde est resté sur la place d’appel. On avait très peur parce que c’était soit un comité de sélection, soit quelque chose d’inattendu. Ce soir là, il y avait trois potences pour une séance de terreur. Trois déportés sont apparus et on a eu droit à la lecture du compte rendu du tribunal d’Auschwitz : c’étaient deux déportés hollandais qui avaient volé des bouts de fil de cuivre pour se faire une ceinture, et un avocat parisien qui avait essayé de les défendre. Ils étaient condamnés tous les trois à la pendaison. Nous sommes restés debout pendant plusieurs heures et on a défilé devant les corps. C’est dans ce camp que j’ai été immatriculé, tatoué sur le bras gauche. Une nuit, il y a eu une alerte aérienne, les lumières se sont éteintes et un garde a cru qu’il s’était fait insulter. Le bloc a été puni, le S.S. voulait que le coupable se désigne, il n’y a pas eu de dénonciation et on nous a fait subir alors une séance de gymnastique. Les S.S. s’étaient mis entre deux baraques avec des gourdins, ils nous donnaient des ordres en allemand très vite, " va à droite, va à gauche, cours en avant, baisse toi, etc. " la plupart ne comprenait pas l’allemand. Chaque fois qu’on se trompait, on recevait un coup de gourdin, le supplice a duré une heure, ceux qui étaient trop frappés, mouraient. En janvier 1945, on a quitté les camps à cause de l’avancée de l’armée russe, on est partis sans rien, sur les routes, on a marché pendant douze jours. On dormait la nuit dans des granges. La colonne avançait et celui, qui perdait un mètre sur la colonne était abattu. Il y a eu quatre-vingt morts par jour. Un moment, mon frère ne pouvait plus marcher, il avait enlevé ses chaussures, ses pieds avaient gonflé et il ne pouvait plus marcher. Il avait mis du tissu autour des pieds. Pendant une pause, on est venu me chercher pour me dire que Maurice ne voulait plus avancer, il voulait rester là, sans bouger. Je suis allé le voir, je l'ai supplié de repartir et finalement nous avons pu nous traîner jusqu’à la nuit, je le portais à moitié jusqu’au prochain camp. Un matin, nous sommes arrivés dans un village et je ne sais plus qui a donné l’ordre, si ce sont les Allemands ou si ce sont les villageois, ils ont déchargé des cuves de pomme de terre. Nous nous sommes précipités sur les pommes de terre, les S.S. pris de court nous ont tiré dessus à la mitraillette, mais on s’est jetés sur les pommes de terre, elles étaient pleines de sang. Arrivés au camp de Grosshausen, on est placés dans une baraque, qui n’était pas terminée pendant trois jours et trois nuits. On ne pouvait entrer dans la baraque que la nuit, on n’avait pas assez de place, on ne pouvait pas s’allonger, alors on dormait assis enchevêtrés les uns dans les autres. On entendait des râles, des cris, ceux qui voulaient aller faire leurs besoins marchaient sur les autres, c’était l’enfer. Un jour, j’ai vu tout en noir, je me suis dit : " ça y est c’est fini pour moi ", je suis tombé, et quand j’ai rouvert les yeux, j’ai vu mon frère, il avait un regard avec un tel espoir que cela m’a redonné courage et je suis reparti. Dans ces moments là, il y avait beaucoup de choses dans les regards. On est partis en direction de Buchenwald, la marche a repris pendant plusieurs jours, beaucoup de camarades mouraient de froid et on se cachait la nuit derrière eux pour s’abriter. On est arrivés à la gare de Veimar. Pendant que les trains manoeuvraient pour nous monter au camp de Buchenwald, la gare a été bombardée. Pour notre malheur, on a été pris sous le bombardement allié et il y a eu beaucoup de morts.

Photo Betty Weider

photo FNDIRP

Arrivés au camp, les camarades de Buchenwald nous ont dit : " on n’a jamais vu des gens dans votre état, ce n’est pas possible ". Les déportés de Buchenwald nous ont porté un petit bout de pain, grand comme un ongle, mais cela faisait du bien. On a été désinfectés, lavés, cela faisait quinze jours qu’on ne se lavait plus et nous sommes allés au petit camp de Buchenwald. A Buchenwald, il y avait des vieux déportés politiques, ils dirigeaient la résistance, on a fait connaissance avec eux et on est entrés dans la résistance de Buchenwald. Ils avaient pris les choses en main. Cela a duré jusqu’en avril au moment de l’insurrection du camp, à laquelle, nous avons participé. Nous avons pris possession du camp, deux jours avant l’arrivée des Américains, les cent à cent vingt S.S. arrêtés ont été gardés, dans une baraque, par les déportés en armes. On les a livrés aux Américains. Nous sommes restés des hommes jusqu’au bout. Papon a envoyé à la mort quatre-vingt-un enfants dans ce convoi. Dans ce camp, les résistants ont caché et sauvé plus de neuf cent enfants : ils avaient ouvert une école, leur apprenaient à lire, ils ont fait preuve d’un dévouement extraordinaire, d’un courage admirable.

photo FNDIRP

A la libération du camp, nous étions 20 000 dans la cour d’appel, en mémoire des 50 000 disparus, nous avons tous fait ce serment : " Nous jurons de nous battre pour la paix, contre la guerre et pour la dignité humaine ". L’officier américain nous a dit un jour que devant les horreurs qu’il avait vues, il avait rayé le mot pitié de son dictionnaire allemand. Mon frère, qui était malade, a été rapatrié dans un hôpital sanitaire. Moi, je suis rentré à Paris, j’ai retrouvé ma mère et mes deux frères.

Je suis resté toujours fidèle à mon serment de la cour d’appel. J’ai toujours continué le combat au côté des opprimés. Papon, lui, a toujours été du côté des oppresseurs. "

Léon Zyguel témoigne

Pendant ou après son témoignage

Marc Robert, Avocat général

Michel Zaoui

Maîtres Daigueperse et Klarsfeld

Maîtres Daigueperse et Klarsfeld


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Page mise à jour le 14 octobre, 2002

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